Q – Quand et comment avez-vous commencé le trading ?
J’ai commencé le trading il y a presque vingt ans, après avoir lu toutes les histoires sur le Krach de 1987.. Mon habitude de l’époque était d’aller à la librairie tous les week-end pour étudier les graphiques de Value Line. Je ne connaissais pas encore la différence entre l’analyse fondamentale et l’analyse technique, j’essayais donc de prendre mes décisions à partir des méthodes exposées par Peter Lynch. Cela ne fonctionna pas trop bien.
J’avais très tôt ouvert mes comptes de trading dans une grosse entreprise de courtage qui pratiquait des taux de commissions très faibles. Je suis passé au trading sur internet dès que Compuserve (FAI historique NDT) le rendit possible au début des années 90.. J’ai alors rejoint un groupe de professionnels de marché, parmi lesquels on comptait Jimmy Rogers et John Bollinger, qui aimaient flâner et chatter sur le forum des investisseurs.
Avant de me lancer dans le trading, j’étais manager dans l’industrie de l’assurance-sinistre depuis plus de 20 ans. Cette situation a facilité ma formation de trader car j’avais peu de choses à faire au bureau au début et au milieu des années 90. J’étais le patron je possédais le seul modem du bureau, ainsi que beaucoup de temps libre. Ainsi, j’en ai profité pour étudier les marchés toute la journée et effectuer des opérations de trading alors que j’étais plutôt censé travailler sur les plaintes relatives aux sinistres.
Q –Tous les traders sont aujourd’hui d’accord sur le fait que la gestion du capital est un facteur clé. Mais il existe de larges divergences entre les traders que je connais sur l’identification du montant et de la valeur du risque. Utilisez-vous un risque identique ou un risque variable en fonction de chaque style ou type de trade ?
J’adapte mon risque au marché. Durant les périodes calmes, je peux détenir 15 ou 20 positions en overnight. Dans les marchés plus volatiles, je me contente de faire du day-trading. Je ne garde aucune position durant la nuit. Je trade des positions plus petites le temps que le marché retrouve ses esprits et des tendances plus larges.
Je fais beaucoup plus d’opérations en day-trading qu’en swing trading. Je fais probablement 5 ou 6 trades intradays pour 1 swing trade. C’est logique car je teste le marché en tradant rapidement. Cela me permet d’attendre tranquillement des entrées swings que je pourrai tenir en overnight.
Q – Le fait que beaucoup de traders réussissent année après année prouve bien que la théorie des marches aléatoires n’est pas valable, pourtant beaucoup de personnes pensent qu’il est impossible de battre le marché, et beaucoup de traders perdent leur argent au cours des premiers mois ou années. Avez-vous des conseils pour eux ?
AF – Contrôler son risque, contrôler son risque et contrôler son risque. Tant que je me focalise sur la partie profit, je suis fichu car c’est ce que les dieux du marché veulent que je fasse. L’avarice est la première chose qui videra vos poches. J’ai aussi appris qu’il n’y a pas de marché juste ou équitable. C’est un sale endroit ou les plus gros jouent des tours cruels aux plus petits traders. Vous devrez vous en rendre compte instinctivement pour éviter ces pièges. Vous pourrez alors décider de vous en servir ou bien de les éviter.
Q – Pouvez vous dire si une personne fera un bon trader ou non? Et si oui, pouvez vous nous dire quelle est la qualité essentielle d’un trader qui réussit?
AF - Beaucoup de traders réagissent aux situations plutôt qu’ils ne les prévoient. Ils suivent ainsi les mouvements de prix et se retrouvent pris dans toutes sortes de retournements. De plus beaucoup de traders ne veulent pas effectuer le dur travail nécessaire pour se faire de l’argent sur le long terme. Ils voient le marché comme un moyen de devenir riche facilement et rapidement.
Je crois aussi que beaucoup de traders ne veulent pas réussir de manière inconsciente parce que cela demande trop de discipline et d’analyse sur soi. Cela parait simple en théorie mais c’est beaucoup plus dur de le transformer en pratique chaque jour. Demandez simplement à une personne qui désire arrêter de fumer.
Les traders qui réussissent ont contrôlé leurs faiblesses dans d’autres aspects de leur vie avant de risquer de l’argent sur les marchés. Ils savent aussi comment observer, sans laisser leurs biais influencer ce qu’ils regardent. Au final, ils n’ont pas peur de perdre de l’argent car ils savent qu’ils le regagneront.
Q – Le trading ou plutôt le bon trading est un mélange de trois éléments pour moi. Stratégie et techniques, le money management, et psychologie et organisation du trader. Lequel de ces trois éléments est le plus important pour vous, s’il y en a un ?
AF – La psychologie du trader est trop surestimée après un certain nombre d’années de trading. A ce point de l’apprentissage, la performance pure est le seul problème et l’analyse psychologique reste simplement une béquille. Pour revenir à ce que je disais avant, contrôler le risque est l'aspect le plus important du bon trading. Et cela rentre dans la catégorie du money management.
Q – Avez vous quelques bons conseils à donner à ceux qui désirent trader pour vivre et ceux qui débutent à peine?
AF – Cela peut prendre 5 ans ou plus pour comprendre les marches et avoir un plan pour prendre l’avantage sur les mouvements de prix. Si vous êtes sur le marché, restez y jusqu’à que ce que cela vous paraisse clair. Mais diminuez votre position jusqu’à ce que votre plan vous dise que vous pouvez risquer plus de votre capital
Q – Vous rappelez vous une expérience particulière qui vous a permis d’améliorer votre trading.
AF – J’ai subit mon pire drawdown en 3 ans en 2006. Je me préoccupe maintenant d’éviter ces périodes en réduisant mon horizon de temps et en utilisant une approche “hit and run” pour beaucoup de trades. J’ai également augmenté ma taille de position et mon exposition totale à leur plus haut car mes résultats me disent qu’il serait fou de trader plus petit.
Q – D ’après mon expérience, les traders qui réussissent travaillent de plus en plus simplement. Le trading est l’art de rester simple dans un monde complexe! Etes vous d’accord avec ça?
AF – Absolument. J’ai arrêté de regarder les nouveaux indicateurs techniques et je me fie juste aux patterns, à quelques moyennes mobiles et au stochastique. Ils me disent juste tout ce dont j’ai besoin de savoir sur l’entrée et la sortie d’un trade.
Q – Avez vous quelque chose à dire pour les lecteurs français de ce site?
AF – Je me suis rendu en France trois fois au cours des trois dernières années, pour animer des séminaires et parler avec des traders. J’adore l’endroit et les gens. Les traders français sont très focalisés et bien informés sur leur métier. Ils sont aussi bien moins cyniques sur leur obsession du marché que les traders américains. Je trouve cela très rafraichissant.