Interview de Capital.fr
14 octobre 2008, La hausse des marchés est illusoire...
"La hausse du CAC 40 est illusoire, le marché parisien va encore perdre 30% !" 14 Octobre 2008, Trader et gestionnaire du fonds or Mansa Moussa Gold Fund (1,2 milliard de dollars d'actifs en gestion), qui affiche une performance moyenne - étonnante par sa constance - de 3% par mois depuis sa création en avril 2005, Mostafa Belkhayate a eu le nez creux en affirmant que l'or allait rallier la barre psychologique des 1.000 dollars et que le CAC 40 allait glisser sous les 4.000 points avant l'automne. Le gérant, qui compte désormais associer les investisseurs à son engagement dans l'humanitaire, nous donne ses prévisions sur le dollar, les matières premières et le CAC 40. Capital.fr : Quel crédit accordez-vous à la hausse historique de la journée d’hier et quels conseils pouvez-vous donner aux investisseurs ? Mostafa Belkhayate : La première chose est de prendre le temps de réfléchir. Surtout ne pas se précipiter pour acheter à tout va. Etre conscient que lorsque le marché est calme, c’est notre raison qui entre en jeu alors que lorsque le krach est là, ce sont nos émotions qui prennent le pas. Personne ne peut sauver votre portefeuille. Ni le marché, ni Sarkozy, ni le G7. Vous devez compter uniquement sur votre propre jugement. Acheter, vendre, attendre ? Vous avez le destin de votre argent entre les mains. Ne le confiez à personne. Mon conseil est simple : ne surtout pas acheter, attendre que l’euphorie joue encore un peu et être parmi les premiers à liquider tout votre portefeuille. Sur le graphique ci-dessous, on prend toute la mesure du potentiel de baisse des grands marchés européens. Ce qui vient d’arriver n’est que le début d'une correction d'ampleur.
Capital.fr : Qu’est ce qui vous fait penser que la chute n’est pas terminée ? Mostafa Belkhayate : Lorsqu’il y a un crime, cherchons le coupable du coté de celui qui en profite. Washington a résolu en moins d’une semaine le grave problème des créances américaines : en faisant croire que Freddie Mac et Fannie Mae, deux organismes américains de financement, risquaient la faillite, les financiers yankee ont coupé l’herbe sous les pieds des chinois, qui possèdent près de 400 milliards de dollars d’obligations émises par ces institutions. Ces dernières, aujourd’hui loin de leur valeur initiale, ne peuvent plus être revendues. Tous ceux qui pourraient en acheter en ont déjà ; les japonais, les européens, les russes, les arabes,… Voilà comment on peut dissoudre des milliers de milliards de dollars de dette. Pour moi, c’est la seule explication du sacrifice de Lehman Brothers. C’est ingénieux, d’autant plus que Washington a manipulé le prix du pétrole à la hausse à partir d’avril 2008 pour "offrir" sur un plateau venimeux un maximum d’obligations aux arabes, qui leur ont toujours fait une confiance aveugle. Une fois le plein fait, on lâche le pétrole et les obligations. Le mécanisme a parfaitement marché puisque aujourd’hui les créanciers amis de l’Amérique n’ont que du papier sans valeur entre les mains. Voilà la vraie guerre ! Sauf qu’il me semble qu’on ait sous-estimé la réaction de "ces amis". Leur réaction sera violente, foudroyante…car ils ne vont pas se laisser faire. La crise boursière ne fait que commencer. On va assister à une attaque en règle sur le billet vert… Capital.fr : Justement la monnaie unique a décroché de 15% depuis le sommet annuel inscrit face au billet vert, à plus de 1,60 dollar pour un euro. Comment expliquer cette évolution ? Mostafa Belkhayate : Le dollar devrait continuer à monter à court terme, mais il ne faut pas se fier à ce mouvement. Le billet vert, comme je viens de l’expliquer, est voué à plonger… pour probablement perdre jusqu’à 50% de sa valeur actuelle. On va assister à un retour violent de la monnaie unique sur ses plus hauts avant 2009, puis l'euro devrait rallier le niveau de 2,25 dollars avant 2010.
Le graphique ci-dessus nous donne clairement une idée de ce qui nous attend : le marché vient de faire un pull back technique sur un niveau très important (80), ayant servi de très fort support depuis vingt ans. La cassure de ce niveau est historique car elle signifie que le potentiel de baisse est égal à l’amplitude de la hausse réalisée entre 1995 et 2002. Ces trois derniers mois, on a assisté à une forte hausse du dollar. Elle est illusoire et ne doit pas faire croire à un retour en puissance du billet vert. Ce mouvement de correction confirme que la prochaine vague de baisse sera violente et irrésistible. Le dollar est mourrant mais cela ne se voit pas encore…sauf pour un analyste technique. La plupart de mes clients du Moyen-Orient détestent ma vision négative du dollar, qu’ils chérissent plus que tout. Ils n’arrivent pas à accepter que ce qui représente la splendeur américaine, le billet vert, n’ait pas d’autre alternative que de se dévaloriser. Pourtant, ceux qui ont suivi mes conseils dès 2005 ne le regrettent pas ! Capital.fr : Le compartiment des matières premières a particulièrement souffert au cours des derniers mois. Quels sont vos anticipations sur l'or noir et le métal jaune ? Mostafa Belkhayate : Le pétrole et l’or semblent avoir baissé pour une même raison, la hausse du dollar. Comme la devise américaine ne peut que chuter, il faut s’attendre à la fin de la baisse des prix des matières premières dès la semaine prochaine. Selon certaines analyses, le fléchissement de l’économie mondiale serait la véritable explication de la chute des cours. Je crois plutôt que des gérants à la recherche de cash ont liquidé à tout va, un peu dans la panique. Bien que le cours de l’or ait reculé, il n’a jamais été dans une aussi bonne position pour exploser. Le marché de l’or physique s’est asséché. Les opérations de gré à gré deviennent de plus en plus rares. Presque tous ceux qui avaient de l’or "caché" pour des raisons fiscales ou autres ont trouvé acquéreur. Maintenant, les chinois sont pratiquement obligés d’aller s’approvisionner sur le marché international, ce qui aura un impact sur les prix. Vendredi dernier, les banques suisses ont connu un record historique de demandes de liquidés, à près de 100 fois la moyenne quotidienne normale. En effet, les clients préféraient liquider leurs avoirs papiers (titres, obligations), retirer le cash et le mettre en sécurité dans leur coffre–fort, de peur qu’ils ne puissent un jour récupérer leurs fonds. Désormais, il est beaucoup plus facile d’investir dans l’or, une fois qu’on a des liquidités disponibles et que la tempête semble maîtrisée. Et plus difficile, psychologiquement, de revenir sur des actions. Par ailleurs, certaines banques centrales ont commencé, de manière discrète mais décidée, à augmenter leurs réserves d’or. La très prochaine baisse du dollar fera office de catalyseur à un engouement pour le métal précieux. Bref, la probabilité que l’or s'envole dans les semaines à venir est très forte. Et le pétrole suivra. Aux sceptiques, je recommande de ne pas vendre ces deux marchés, et aux courageux de ne pas hésiter à devenir propriétaires de lingots d’or.
Source
Propos recueillis par Nicolas Gallant pour www.capital.fr
http://www.belkhayate.ma/fr/detail_act.php?id_act=105